Si 2016 a été l’année de la mise en ligne de très nombreux reportages photographiques numérisés, la Section des archives poursuit plus globalement le traitement et la numérisation de ses archives de tous genres, incluant les documents textuels, les estampes, les gravures, les dessins, les plans ou les cartes.
Parmi les milliers de documents ayant défilé devant nos yeux cette année, les lots d’estampes et de cartes anciennes comprises dans le fonds A. Léo Leymarie ont notamment attiré notre attention.
Né en 1876 à Paris, le professeur, journaliste et auteur A. Léo Leymarie collabore avec de nombreuses publications québécoises, acadiennes et franco-américaines. Employé de la province de Québec au pavillon canadien de l’Exposition universelle de Paris en 1900, il publie divers ouvrages en lien avec l’histoire du Canada et effectue pour ce faire de nombreuses recherches dans les archives françaises. C’est par exemple lui qui découvre en 1925 l’acte de baptême de Paul de Chomedey de Maisonneuve. Interné en Allemagne durant la Seconde guerre mondiale, il meurt des suites de cet internement le 6 juin 1945.
Dans le cadre de son travail, Leymarie accumule une imposante collection de documents d’archives portant sur la Nouvelle-France et le Canada. Déposée d’abord à la bibliothèque centrale de Montréal, cette collection est versée aux Archives de la Ville de Montréal en 1997. La Section des archives a récemment complété la numérisation et la publication des documents iconographiques et cartographiques d’intérêt qu’elle comprend : les portraits d’hommes et de femmes illustres de nationalité canadienne ou française y côtoient les dessins et les plans des villes canadiennes ou les cartes de l’Amérique.
Nous choisissons aujourd’hui de souligner la mise en ligne de ces documents par la publication d’un album Flickr spécial regroupant 34 des plus belles cartes contenues dans le fonds. Si les cartes anciennes ne constituent en rien une caractéristique prédominante de nos archives (d’autres institutions proposent une collection beaucoup plus vaste pour ce type de documents), impossible de ne pas tomber sous le charme de ces vestiges colorés d’un passé parfois surprenant. On y prend conscience de l’évolution rapide de la cartographie de l’Amérique depuis le 15e siècle, sous l’influence des vagues d’exploration européenne. Difficile d’imaginer aujourd’hui à quel point la rencontre de ces mondes éloignés a constitué une révolution pour chaque partie impliquée.
L’atlas Maior ou Theatrum Orbis Terrarum, publié en 1662 et en 1665 par l’éditeur Joan Blaeu comprend par exemple un texte intitulé « Nouvelle-France & Terres adjacentes », qui permet de mesurer l’étendue des changements survenus, en présentant ainsi les secteurs de Terre-Neuve, de l’Estuaire du fleuve Saint-Laurent et du Québec actuel :
À propos de Terre-Neuve : « Cette terre est toute couverte de montagnes et de bocages ; la plupart des arbres sont des pins : plusieurs sont tombés de vieillesse et empêchent tellement de voir la terre et le chemin aux voyageurs qu’on ne sait de quel côté se tourner. (…) Les ours apparaissent quelquefois auprès des loges, d’où on les tue assez souvent; ils sont blancs. On doute s’il y a quelque peuple en cette région et il n’y a personne qui le puisse témoigner. (…) Il a été rapporté par les compagnons de navigation qu’au mois de May, ils étaient arrêtés entre tant de glaces qu’il y en avait des îles hautes de soixante brasses, le côté desquelles exposé au soleil étant fondu, toute la masse par un certain contrepoids fut tournée sens dessus dessous, avec grand danger pour ceux qui étaient présents. »
Au sujet du Saguenay : « Sur son rivage entrecoupé s’élèvent à droite et à gauche de fort hautes montagnes et rochers, couvertes de bocages fort épais et horribles à voir. La contrée qu’elle traverse est déplaisante au possible, tant pour la stérilité du terroir que pour l’intempérie de l’air, et qui n’est aucunement propre à être habitée à raison des froidures continuelles. Enfin c’est une vraie solitude, car les forêts n’y nourrissent pas d’oiseaux, hormis quelques uns des plus petits (…) Les sauvages content des choses étranges; c’est qu’après plusieurs jours de chemins, ayant surmonté divers précipices dont l’eau se jette du haut en bas et traversé plusieurs lacs, enfin ils viennent en un lieu d’où ils voient la grande mer septentrionale. »
À propos d’Hochelaga (bourgade iroquoienne sur le site de Montréal, telle que visitée par Champlain en 1535) : « La ville était éloignée de six ou sept lieues du rivage, située en un beau terroir et bien cultivé, où il y avait une grande abondance de chênes et de sapins et des champs fort spacieux (…) La ville était munie en rond d’un rempart de bois fait de sommiers, disposés en travers l’un dans l’autre et de pieux agencés par ensemble avec un singulier artifice couvert de planches dedans et dehors. (…) Il devait y avoir dans la ville quelque peu moins de cinquante maisons, bâties de même matière et couvertes d’écorces d’arbres ».
***
Découvrez aujourd’hui :
Notre album Flickr présentant 34 cartes anciennes de l’Amérique (1612-1901) spécialement sélectionnées :
https://www.flickr.com/photos/archivesmontreal/albums/72157678032440335/with/31313653720/
Le fonds A. Léo Leymarie :
https://archivesdemontreal.ica-atom.org/fonds-leo-leymarie-15-1981
***
Si les estampes, les plans et les cartes anciennes vous intéressent, vous pouvez par ailleurs consulter les fonds de ces deux autres grands collectionneurs :
Philéas Gagnon : https://archivesdemontreal.ica-atom.org/collection-phileas-gagnon-1546-1963
Aegidius Fauteux : https://archivesdemontreal.ica-atom.org/fonds-aegidius-fauteux-17-1941-surtout-1900-1941