par Gilles Lafontaine
Si je vous dis que la saison 1946 du club de baseball Les Royaux de Montréal a marqué à sa manière la lutte des afro-américains pour la reconnaissance de leurs droits civiques, vous direz que je suis à côté de la plaque; et pourtant. Le tout commence le 23 octobre 1945. Hector Racine, président des Royaux, une équipe de la Ligue internationale et club-école des Dodgers de Brooklyn, annonce que Jackie Robinson jouera à Montréal en 1946 et qu’il devient le premier Noir à signer un contrat pour un club de calibre professionnel. Il s’empresse d’ajouter que « cela révolutionnera le monde du baseball! »
Jack Roosevelt Robinson naît en 1919 dans un décor campé au milieu de plantations dans l’état de Georgie. Très tôt il démontre de grandes qualités athlétiques qu’il exerce dans de nombreux sports. Le directeur général des Dodgers de l’époque est fasciné par ce talent et il juge, au sortir de la Deuxième Guerre mondiale, que bien des choses ont changé et qu’il est temps que le baseball cesse d’être le miroir du fossé racial qui divise la société américaine. Sa stratégie est en deux temps : d’abord faire jouer Robinson pendant une année dans une ville réputée pour sa tolérance raciale et faire la démonstration que le baseball ne peut plus être exclusivement blanc et, par la suite, lui faire joindre la grande équipe des Dodgers. C’est donc dans ce contexte que la saison de 1946 des Royaux se déroule. Très tôt, une véritable histoire d’amour naît entre le nouveau deuxième but et les amateurs. De nombreux journalistes américains viennent à Montréal et se font l’écho du vent de changement qui souffle sur le baseball. En prime, les Royaux remportent la Petite série mondiale ce qui donnera l’occasion à une foule en liesse de soulever Robinson pour un tour d’honneur du stade De Lorimier. Au final, à une période marquée par un fort mouvement de revendications des Noirs américains notamment pour l’abolition des discriminations dans les lieux publics, le passage de Jackie Robinson à Montréal et le nouveau visage qu’il donne à un sport jusque là réservé aux Blancs figure parmi les actes fondateurs de cette marche vers l’égalité.
À suivre…