Le 1er janvier 1906, les Montréalais se pressent à l’entrée d’un nouvel établissement de «vues animées», le Ouimetoscope. Installé dans la salle Poiré, au coin des rues Montcalm et Saint-Catherine, la nouvelle attraction rapporte une centaine de dollars à son propriétaire, Léo-Ernest Ouimet, dès la première semaine.
Né à Saint-Martin sur l’île Jésus (aujourd’hui Laval) en 1877, Ouimet délaisse la ferme familiale pour venir s’installer à Montréal. Il y apprend le métier d’électricien et devient éclairagiste de théâtre. Fortement intéressé par ce nouveau média qu’est le cinéma, il s’occupe des projections au parc Sohmer, réalise des courts métrages et créé une compagnie, la Ouimet Film Exchange. L’appareil de projection qu’il conçoit, le Ouimetoscope, influence même le travail réalisé par Thomas Edison. Dans le cadre de ses réalisations documentaires, Ouimet fera appel à Lactance Giroux comme cameraman. Ce dernier deviendra, en 1920, le premier photographe engagé par la Ville de Montréal.
En 1907, Léo-Ernest Ouimet fait démolir la bâtiment qu’il occupe et entreprend la construction du «Grand Ouimetoscope» qui ouvre ces portes en août. L’année suivante, plusieurs cinémas ouvrent leurs portes et la concurrence devient plus féroce. Le monopole américain de distribution de films créé des succursales canadiennes et évince ainsi Ouimet de ce marché. Au même moment, l’Église montréalaise entreprend sa campagne contre les représentations cinématographiques le dimanche. À la fin de l’été de 1908, le maire Louis Payette cèdant aux pressions de la Ligue pour l’observance du dimanche, fait émettre des contraventions aux différents cinémas. En raison de problèmes pulmonaires chez deux de ses enfants, la famille Ouimet s’installe en Californie chaque hiver à partir de 1913. Durant le Première Guerre, Ouimet se retire de la projection pour refaire à nouveau de la distribution et surtout de la réalisation. On lui doit, entre autres, un film sur l’ouverture de la Bibliothèque de Montréal par le maréchal Joffre en mai 1917. À la suite de la mort de deux de ses enfants, Ouimet s’installe définitement à Los Angeles en 1921 où il produit le long-métrage Why get married qui aura peu de succès. Sa situation financière de dégradant, il accepte un poste pour une compagnie de distribution à Toronto mais retourne à Hollywood en 1930. Ruiné, il revient au Québec en 1933 pour devenir un an plus tard gérant du cinéma Imperial. Sa situation financière ne s’étant pas amélioré, il accepte un poste de gérant d’une succursale de la Commission des liqueurs. Au moment de sa retraite en 1956, il est commis de magasin. Il meurt le 2 mars 1972 à l’âge de 94 ans.
En 1978, le neveu de Ouimet, Léon H. Bélanger, publie chez VLB éditeur un ouvrage sur la vie de son oncle et sur les débuts du cinéma au Québec intitué Les Ouimetoscopes. On redécouvre alors une personnalité novatrice et marquante de la vie culturelle montréalaise au début du XXe siècle (En mai 1979. l’auteur remet son manuscrit aux archives de la Ville. Ce document ainsi que sa version imprimée constitue le Fonds Léon H. Bélanger (P55)).
Découvrez également les programmes du Ouimetoscope.
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