Par Gilles Lafontaine
C’est le 10 septembre 1939 que le Canada déclare la guerre à l’Allemagne nazie. L’élection de Mackenzie King à la tête du gouvernement fédéral, en mars 1940, porte évidemment sur la participation du Canada au conflit. L’engagement de King est d’éviter toute conscription afin de ne pas revivre la crise de 1917 sur cette question. Toutefois, l’évolution des hostilités en Europe motive le gouvernement à imposer l’enregistrement national aux Canadiens à l’été 1940. Il n’en faut pas davantage à Camillien Houde pour réagir. Il déclare aux journalistes son opposition à l’enregistrement national qui, dit-il, est un premier pas vers la conscription. Dans sa fougue pour dénoncer cette décision, il néglige de considérer la loi des mesures de guerre qui confère au gouvernement des pouvoirs extraordinaires notamment en matière de détention. Perçu comme un ennemi de l’intérieur, le maire de Montréal est cueilli par la police fédérale à sa sortie de l’hôtel de ville le 5 août 1940 et est dirigé sur le camp de Petawawa, en Ontario. En cela, son nom s’ajoute à la cohorte des nombreux Canadiens d’origine japonaise, italienne ou allemande qui ont subi le même sort. Pendant les quatre années qui suivront, Houde sera soumis aux plus rudes corvées et ne pourra que difficilement entrer en contact avec les membres de sa famille. Lors du plébiscite sur la conscription, en avril 1942, Houde devient un véritable martyr pour les anti-conscriptionnistes. Il faut attendre le 17 août 1944, après quatre années de détention, pour assister au retour triomphal de Camillien Houde. Une foule en liesse lui réserve un accueil triomphal à la gare Windsor. Porté par cette vague de sympathie, il est réélu dès l’automne et demeure maire de la métropole jusqu’en 1954. Il s’éteint le 11 septembre 1958 et sa dépouille est exposée dans le hall d’honneur de l’hôtel de ville. Adulé des gagne-petit mais accusé par les intellectuels de manquer de sens politique, Camillien Houde n’en reste pas moins une figure emblématique de l’histoire de Montréal.