Par Julie Fontaine
Depuis quelques mois, le débat entourant la conservation de la résidence de Louis-Hippolyte La Fontaine, rue Overdale à Montréal, a remis à l’avant-scène ce personnage politique majeur de l’histoire canadienne. Avec Robert Baldwin, La Fontaine est en effet le principal artisan de l’obtention du gouvernement responsable au Canada, principe qui a jeté les bases du système confédératif actuel. Il a de plus assumé le premier la charge de premier ministre du Canada devenant du même coup le premier Canadien français à diriger le pays. Pourtant, malgré ces accomplissements d’envergure, La Fontaine, à ce jour, ne fait pas l’unanimité quant à ses réalisations. Qui donc était cet homme qualifié d’opportuniste par les uns et d’intègre par les autres?
Le parcours de La Fontaine commence à Boucherville où il naît le 4 octobre 1807. Fils du menuisier Antoine Ménard dit La Fontaine et de Marie-Josephte Bienvenue, il fait son cours classique auprès des Sulpiciens. Élève brillant, mais rebelle, il s’adapte mal à la rigidité du Collège. Aussi le quitte-t-il en 1820. Par la suite, il devient clerc en droit au bureau de maître François Roy et est reçu au barreau le 18 août 1829. Doué, La Fontaine s’entoure rapidement d’une bonne clientèle et son mariage avantageux avec Adèle Berthelot lui permet de se tailler une place confortable au sein de la bourgeoisie montréalaise.
Parallèlement à ses activités d’avocat, La Fontaine s’implique politiquement. Il est élu député pour la première fois dans le comté de Terrebonne en 1830, puis réélu en 1834. Dès cette époque, il milite activement au sein du parti patriote participant aux assemblées les plus houleuses et soutenant les idées du mouvement à travers les journaux tels que La Minerve. Aux yeux de plusieurs, sa forte allégeance à Louis-Joseph Papineau de même que l’ardeur avec laquelle il défend les idées patriotes font de lui un des militants les plus intransigeants de parti. L’imminence des troubles à l’automne de 1837 dissipera toutefois cette image.
En effet, bien que convaincu de l’importance de l’émancipation canadienne-française, La Fontaine répugne totalement à sa réalisation par la violence et craint les affres d’une guerre civile. Tout juste avant les premiers affrontements en novembre 1837, il tente donc tout ce qu’il peut pour les éviter. Il écrit d’abord au gouverneur général pour qu’il rende le Conseil législatif électif, puis se rend à Québec réclamer la convocation du Parlement. Ces vaines tentatives le mènent à Londres où il arrive toutefois trop tard; les premières rébellions ont déjà éclaté et la constitution canadienne vient d’être suspendue.
La Fontaine revient au pays le 23 juin 1838. Pour une majorité de patriotes bas-canadiens, sa mission en Grande-Bretagne a été perçue comme une volte-face, voire une désertion. Pourtant, La Fontaine manifestera à plusieurs reprises par la suite son appui aux patriotes. Incarcéré lui-même le 4 novembre 1838, alors que les troubles reprennent, il travaillera notamment dès sa libération à l’obtention de leur amnistie générale et, plus tard, à l’indemnisation des victimes des rébellions. La suite de son parcours politique lui fournira l’occasion de couronner de succès ces efforts.